Le système des publications est en danger sous la pression des revues de faible qualité et de la communauté des chercheurs qui payent pour publier vite. L’article (en libre accès) de mai 2022 ‘Accelerated peer review and paper processing models in academic publishing‘ publié dans Publishing Research Quaterly (Springer) détaille d’autres dérives inquiétantes. Le premier auteur est un habitué d’alertes diverses, comme il le signale dans sa déclaration de liens d’intérêts : « il a été banni de soumettre des manuscrits en 2015 aux revues de Taylor & Francis suite à ses critiques du système de publications« .
Cet article de 13 pages décrit les possibilités de l’APR (Accelerated Peer Review) proposé par certaines revues. Les auteurs payent pour bénéficier d’une évaluation par les pairs accélérée. Il décrit ces systèmes à partir de revues de Taylor & Francis, Future Medicine Ltd, Elsevier, et de deux autres revues qui sont European Heart Journal (Oxford University Press) et Acta Acustica (EDP Sciences). Il est rappelé que pour la plupart des recommandations éthiques des revues, celles-ci ne doivent ni garantir l’acceptation, ni un délai de peer review. Ces pratiques sont difficiles à investiguer, et les informations sur les sites des revues semblent changer… Il y a des commentaires sur la difficulté de trouver les vraies informations : qui fait le peer-review rapide ? Soit un membre du comité de rédaction, soit un relecteur externe… et sont-ils payés selon le délai demandé ? Un système pourrait plaire : lors de la soumission, l’auteur paye la revue pour un peer-review accéléré (et la revue paye le relecteur).
Néanmoins, il y a des exemples du type (voir page 601) : Select Taylor & Francis journals offer an “Accelerated Publication » option to authors during submission. Regular papers pass through a “Standard Track”, which the publisher claims takes 14 weeks from submission to online publication, whereas papers that pass through “Rapid Track” and “Fast Track” take 7–9 and 3–5 weeks, respectively, to complete this process. There is no fee for “Standard Track”, but the fees for “Rapid Track” and “Fast Track” are US$3900 / €3400 / £3000 and US$7000 / €6200 / £5500, respectively for one paper.
Dans les archives du web, les auteurs ont trouvé des informations, dont des listes de revues et un tableau (page 605 de l’article) comme celui que je reprends dans l’image ci-contre. Un exemple ancien est celui dont les instructions garantissaient l’acceptation si le premier auteur était membre du comité de rédaction de la revue.
Publier devient simple : payer la revue à l’acceptation pour aller vite (système auteur-payeur plutôt que lecteur-payeur), et payer les relecteurs pour gagner un peu plus de temps (encore système auteur-payeur). Nos responsables des Universités, Agences, Organisations diverses pourront féliciter les chercheurs qui publient vite et beaucoup (ceux qui ont de l’argent auront encore plus d’argent). SUPER.
Merci à Clara Locher qui a tweeté cet article.
Mise en garde (29/09) : des commentaires viendront car les accusations de l’auteur méritent d’être revues. Correction (30/09) : dans ma réponse au commentaire, je m’excuse auprès d’EDP Sciences, bon éditeur français.
2 commentaires
Je souhaite apporter quelques précisions :
Acta Acustica est la continuation de Acta Acustica united with Acustica, mais ce n’est pas la même revue. Acta Acustica united with Acustica (revue citée dans l’article de Springer) était publié en 2017 (date citée par l’article) par un autre éditeur.
EDP Sciences publie Acta Acustica depuis 2020, il n’y a absolument pas « d’accelerated peer review » dans la revue ni dans aucune de nos revues, EDP Sciences n’ayant jamais eu ce type de pratique.
Vous noterez d’ailleurs que l’article original chez Springer parle de 2017 et n’a même pas de lien pour appuyer son propos :
Acta Acustica, published by EDP Sciences, used to offer, as recently as 2017, a paid (€350) “Fast Track” service. That service can no longer be found in the current instructions for authors, suggesting that it was scrapped.
Ainsi, quand vous écrivez : Ces pratiques sont difficiles à investiguer, et les informations sur les sites des revues semblent changer… », vous jetez l’opprobre sur cette revue, partant du principe que si cela n’y est pas, c’est parce que l’on le cache alors que cela n’y est pas…parce que l’on ne le pratique pas.
Bonjour,
Recevez mes excuses, et vos explications sont claires et convaincantes.
Je n’ai pas vérifié, prenant à la lettre l’article analysé. J’aurais dû contrôler car le premier auteur, Jaime A Teixera da Silva (biologiste des plantes qui vit au Japon), a un curriculum fait de publications rapides pas toujours de qualité. Je ne le connais pas. J’aurais dû regarder de plus près, et je ne me suis plus rappelé qu’il est en conflit depuis longtemps avec Taylor & Francis, comme rapporté par RW https://retractionwatch.com/2015/09/24/biologist-banned-by-second-publisher/
Dans ce contexte où des revues de faible qualité font n’importe quoi avec la complaisance de chercheurs, c’est parfois difficile de comprendre ce qui se passe.
Merci pour votre réaction.
Cdlmt