Histoire claire d’une rétractation d’un article pour auto-plagiat… mais qui a été très émotionnelle pour les auteurs et rédacteurs : l’article rétracté était un article de 2011 sur l’éthique et l’intégrité du processus de publication ! Un comble, mais la note de rétractation de 6 pages explique toute la chaine de décision et propose des leçons. Cette rétractation a été conjointement signée par les rédacteurs de la revue qui a rétracté l’article (Management and Organization Review), et les 2 auteurs (le premier auteur a plagié un éditorial qu’il avait publié en 2009). MOR est une revue internationale de management de Wiley, et la rétractation est en accès gratuit dans le numéro de mars 2014. L'article rétracté de 2011 est en accès libre, ainsi que l'article de 2009 qui a été l'origine du plagiat.
Alerte donnée en 2013 par un lecteur enseignant l’intégrité à des étudiants, et ayant donné les 2 articles à lire : les étudiants ont discuté l’auto-plagiat lors du cours. Les rédacteurs ont contacté les auteurs et proposé d’utiliser ce cas pour l’enseignement, et ils ont consulté à nouveau les étudiants pour discuter la conduite à tenir. Les auteurs ont exprimé « surprise, contrition and humility ». Ils ont consulté le médiateur de leur revue (position qui existe dans peu de revues).
La lettre des auteurs est un modèle d’humilité, de reconnaissance des faits, d’explications, mais pas d’excuse : le premier auteur a donné de nombreuses conférences sur l’intégrité de la recherche. Il a écrit honnêtement les 2 articles, et il aurait dû signaler les duplications. Le logiciel a dépisté les similitudes, mais pas le plagiat d’idées, ce qui est toujours le cas. L’auteur n’a pas comparé les 2 articles. J'ai tendance à croire qu’il était très honnête. L’article rétracté contient de nouvelles idées qui seront ‘perdues’. Les leçons :
- Le logiciel anti-plagiat a donné au premier passage un taux de duplication de 18 %, (ou de 26 % en enlevant la présentation de l’article) inférieur aux seuils habituellement considérés pour alerter la rédaction (entre 20 et 30 % en général) ;
- La décision de rétractation a été difficile car les auteurs sont connus, et ont une très bonne réputation ; la décision prise a été celle qui aurait été prise pour tout auteur ;
- Les 2 articles sont en ligne avec des commentaires pour que ce cas puisse être utilisé en formation.
MOR est la revue de 'The International Association for Chinese Management Research' (IACMR) was founded in 2002. Its aims are to:
- Provide a forum for the exchange of ideas and experience among researchers about management research in the Chinese context.
- Facilitate international collaboration between management researchers around the globe.
- Promote the development of management research capabilities in and on China.
3 commentaires
Excusez-moi d’intervenir avec une question qui va vous paraitre stupide, mais comment peut-on condamner l’auto-plagiat?
Si je reprends à mon compte quelque chose que j’ai moi-même écrit auparavant sans plagier quiconque, quel est le problème?
Mano: la question n’est pas stupide, car argumentée. En effet, si je me vole 100 euros à moi-même, personne ne se plaindra, et surtout pas moi.
En fait, le terme « auto-plagiat » n’est pas très recommandable, car il ne s’agit pas d’un sous-concept du « plagiat ». Il s’agit en fait de la duplication, totale ou partielle, d’un article. Je vous recommande de lire le paragraphe 3.4 de l’article « plagiarism » de wikipedia, qui me parait tout à fait excellent, et qui montre en particulier qu’il y a des limites floues (très floues même), qui font une nette différence avec le plagiat pur.
http://en.wikipedia.org/wiki/Plagiarism
3.4 Self-plagiarism
3.4.1 The concept of self-plagiarism
3.4.2 Self-plagiarism and codes of ethics
3.4.3 Factors that justify reuse
Je crois qu’il y a cependant un point qui n’est pas explicitement noté dans en.wiki: la duplication, ou la multiplication d’un article de la part d’un auteur, a parfois comme but unique de gonfler son CV sans trop se fatiguer. Comme cela introduit un déséquilibre vis-à-vis de ses collègues (ou ennemis), c’est considéré comme une injustice, d’autant plus que ce n’est pas facilement détectable.
Merci pour la réponse, c’est un peu plus clair pour moi, bien que ça demeure effectivement quand même un peu flou 😉
Bref, si l’on veut éviter l’auto-plagiat on écrit quelque chose dans le style « comme je l’ai déjà écrit dans mon précédent bouquin, etc. » et si possible en mentionnant l’éditeur au cas où il se vexerait!
On peut aussi appeler l’auto-plagiat du recyclage, mais pas toujours pour la bonne cause…