Quel avenir pour les publications des sociétés savantes ? Une étude (15 octobre 2024), publiée par UKSG (United Kingdom Serials Group) journal, apporte des pistes de réflexion. Son titre : You don’t know what you’ve got till i’s gone: the changing landscape of UK learned society publishing.
Ce titre est partiellement emprunté à une chanson de rock de 1988 par le groupe américain Cinderella : Don’t know what you got (Till it’s gone). Une chanson sur la séparation ! Mais peut-être une autre origine ?
Quels rôles pour les Sociétés savantes ?
Je publie périodiquement des billets sur les Sociétés savantes en déplorant la perte de la gestion des savoirs au profit d’acteurs mercantiles. J’ai publié une synthèse : « Les sociétés savantes : comment se renouveler ? » dans Science & Pseudo-Sciences en 2021. Dans une recherche faite avec un sociologue (F Steudler, Strasbourg, décédé en 2014), et publiée en 2004, nous avions proposé cette définition : « Groupe organisé, dans un champ disciplinaire donné, dont les adhérents ont pour objectif de rendre compte de leurs travaux, d’améliorer la connaissance dans leur domaine, d’assurer la formation et la recherche, de diffuser les résultats de leurs activités, de soutenir et promouvoir leur discipline ». Dans cet article UKSG, la définition est voisine mais ajoute la notion ‘charitable’ : « Learned societies are charitable organizations which support academics and the dissemination of knowledge whithin a particular area or academix field »
Cet article avec des données de 277 sociétés savantes britanniques montre que les publications appartenant à ces sociétés sont en déclin, avec peut-être une hypothèse que ce soit lié au modèle de l’accès ouvert. C’est inquiétant pour moi. Ce sont 277 sociétés qui publient des revues parmi un échantillon d’environ 1000 sociétés. J’ai repris une image de l’article montrant les évaluations entre 2015 et 2023. Les préprints menaceraient les revues.
La publication a pris un tournant dangereux en privilégiant quantité sur qualité, et les Sociétés savantes restent probablement un garant de qualité. Cet article est plein d’autres informations, en prenant du temps pour bien le lire : la sous-traitance des revues semble augmenter. Les éditeurs partenaires de societés savantes en 2023 (table 1) sont : Wiley (53 partenariats), Taylor & Francis (53), Cambridge University Press (42), Oxford University Press (29), SAGE (21), Elsevier (17).
Les données économiques sont difficiles à analyser car peu accessibles ; une hypothèse : la diminution des revenus de publication pourrait s’accompagner d’une augmentation des accès aux publications.
J’ai traduit en français le résumé assez informatif :
Cette étude s’appuie sur un ensemble de données longitudinales de 277 sociétés savantes britanniques couvrant la période 2015-2023 pour fournir des informations factuelles sur l’évolution du paysage de l’édition sociétale. Elle identifie un déclin rapide du nombre de sociétés auto-publiées et un paysage d’externalisation de plus en plus complexe. De nouveaux partenariats d’édition émergent avec des presses universitaires et d’autres entités à but non lucratif plutôt qu’avec des éditeurs commerciaux, tandis que toutes les sociétés britanniques, à l’exception des plus grandes, ont vu leurs revenus d’édition diminuer en termes réels depuis 2015. En général, les éditeurs de sociétés savantes britanniques voient leur influence diminuer car les conditions du marché favorisent des modèles d’édition axés sur la quantité plutôt que sur la qualité. Le déclin des éditeurs de sociétés indépendantes est une conséquence involontaire de la transition vers le libre accès, mais la tendance à l’externalisation accrue peut être basée sur des hypothèses erronées. L’analyse des données financières d’un sous-ensemble de 21 sociétés indique que les sociétés autoéditées ont enregistré une croissance soutenue de leurs revenus d’édition, tandis que les sociétés ayant des partenaires d’édition ont connu un déclin significatif. Pour les sociétés qui ont les moyens et la volonté de publier leurs propres revues, cette étude plaide en faveur du maintien, voire de la reconquête, de leur indépendance.
Merci à The MetaNews