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Comment abuser du Lancet et des médias grand public : quand une hypothèse scientifique devient preuve pour le grand public !

Points clés

CloserLe système médiatique bien utilisé permet de torturer la science et nous avons un exemple drôle (ou triste ?). Deux auteurs ont publié une lettre dans The Lancet (21 décembre 2013), dont le titre est : Robespierre: the oldest case of sarcoidosis? Il s'agit d'une hypothèse. Ne montrez pas cette lettre aux spécialistes de la sarcoïdose…

La controverse est partie aussi vite que pour la tête de Henri IV suite à une médiatisation trompeuse. Les 2 auteurs ont fait une conférence de presse de 2 heures ! Oui 2 heures de conférence de presse pour dire qu'une lettre au Lancet était une découverte fabuleuse…  Dans les revues scientifiques, les lettres sont un bon moyen de communication rapide, mais elles ne sont pas toujours soumises à un peer-review comparable à ce qui est fait pour les articles originaux. Ce qui est habituel s'est passé : les médias ont titré sur l'existence de la sarcoïdose chez Robespierre, l'hypothèse devenant preuve. La plupart des titres étaient trompeurs, ainsi que le contenu de l'article du journal. J'en cite quelques uns : Robespierre avait développé une sarcoïdose ; Robespierre : diagnostic de variole et de sarcoïdose 219 ans après sa mort ; Variole, lèpre, sarcoïdose : les nombreuses maladies de Robespierre ; etc…  allez voir les 22 titres que j'ai compilés, liste NON exhaustive. Il est évident que de nombreux journalistes manquent d'esprit critique…  mais des journalistes, notamment ceux des grands médias nationaux, ont compris la tromperie. Ces journalistes avec un esprit critique discutent la controverse.

La controverse pourrait être résolue avec un peu de volonté. D'après certains, dont Philippe Delorme : le manque de sérieux d'une telle "découverte". .. le "masque mortuaire" est un faux reconstitué a posteriori d'après portraits (Le Figaro, 3 janvier 2014). Pourquoi nos instances universitaires ne nomment pas une commission indépendante (vraiment indépendante) pour aller voir les données sources ? La commission aurait du travail, car il faut aussi analyser l'identification de la tête de Henri IV. Laisser faire est plus facile. J'aimerai connaître la vérité !

La plupart de nos médecins légistes français regardent cela avec admiration. Je les comprends, ils aimeraient être dans The Lancet, et dans les journaux féminins et régionaux. Comment les conseiller ? Ils ont l'intelligence nécessaire pour le faire, et ils doivent ajouter quelques ingrédients : ne pas travailler en équipe avec ses pairs, immodestie, utilisation intelligente et habile des médias grand public, sens des détails subtils, etc…

The Lancet sait bien que l'affaire Wakefield a commencé par une conférence de presse trompeuse….. et qu'il a fallu 12 ans pour que les langues se délient... Patience, nous saurons un jour….

PS : bonne analyse de JY Nau (voir commentaire)

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9 commentaires

  • Merci pour votre post. Quelques éclaircissements sont nécessaires : notre point presse (en effet, on ne fait pas de conférence de presse pour une lettre) portait d’une part sur la lettre (expliquer pourquoi le diagnostic de sarcoïdose a été proposé, et notre méthodologie de diagnostic rétrospectif) et sur la reconstitution du visage de Robespierre (qui ne fait pas partie stricto sensu de la lettre du Lancet, mais sert uniquement d’illustration). Le masque mortuaire ne fait ainsi pas partie de la démarche diagnostique : la remise en question de son authenticité (intéressante sur le plan historique… quand elle est menée par de vrais historiens) n’a aucune incidence sur la teneur de la lettre. Ceci explique la durée de ce point presse (2 heures en effet, réponses aux questions comprises)… Je pense que notre prudence dans le diagnostic est assez évidente (ce point d’interrogation dans le titre même, en témoigne, tout comme les diagnostics différentiels proposés dans le corps de la lettre), d’autant plus que la lettre était, au moment de sa sortie, en accès libre et gratuit pour tous, y compris les journalistes…
    Quant à la justification de ces études médico-historiques sous ma direction, elles trouvent une place toute légitime en anthropologie médico-légale par le développement, l’amélioration et l’innovation de techniques d’identification individuelle et de diagnostic rétrospectif (état de santé, cause de décès, etc.). C’est cet axe de recherche que j’ai présenté dans mon habilitation à diriger les recherches, et que je continuerai de poursuivre au sein de ma discipline, la médecine légale.
    Bien à vous,
    Philippe

    Répondre
  • @ Hervé Maisonneuve : vous écrivez en conclusion de votre billet « The Lancet sait bien que l’affaire Wakefield a commencé par une conférence de presse trompeuse…. ».
    Ne faudrait-i pas distinguer entre l’article de Wakefield et de son équipe de la conférence de presse stricto-sensu ? Ne faudrait-il pas distinguer entre celle-ci et la réception qu’elle a connue ensuite dans les média ?
    Je crois me souvenir ainsi que l’article -une exposition de cas- ne parlait que d’une HYPOTHESE. Par contre – j’écris cela de mémoire – Wakefield s’est avancé plus avant à l’occasion de la conférence de presse. je ne saurais dire s’il a présenté expressément son hypothèse comme avérée ; je crois plutôt me souvenir que c’est à cette occasion qu’il a fait connaître sa position vis-à-vis de la campagne de vaccination en cours en faveur du vaccin ROR multivalent, une nouveauté à l’époque.
    Pour aggraver mon cas, je dois rappeler que tout ce qu’a écrit Brian Deer n’est pas incontestable.
    ( cf ma remarque dans votre article intitulé « Science et Avenir : la fraude scientifique, bel article de Marc Gozlan » http://www.h2mw.eu/redactionmedicale/2013/12/science-et-avenir-bravo-pour-larticle-de-marc-gozlan-sur-.html )
    S’il en était besoin, le commentaire ci-dessus de Philippe Charlier illustre la difficulté à rendre compte d’une communication avec la presse !
    Respectueusement.

    Répondre
  • Bonjour, l’affaire Wakefield est compliquée, et c’est la conférence de presse, pas l’article seul, qui a entraîné la polémique.
    Mon propos est que ce monde de médias est surprenant : est-ce qu’une hypothèse ROR/autisme sur 12 cas non comparatifs ? est-ce qu’une hypothèse de sarcoïdose méritent une conférence de presse ? Les journalistes manquent d’esprit critique et privilégient le scoop plutôt que la bonne science.
    Mais c’est complexe, très complexe !
    Les victimes : nous tous !

    Répondre
  • Comment Philippe Charlier peut-il écrire, sans broncher que « le masque mortuaire ne fait ainsi pas partie de la démarche diagnostique : la remise en question de son authenticité […] n’a aucune incidence sur la teneur de la lettre. »
    Dans ce cas de Robespierre, comme dans celui de Henri IV (et peut-être dans d’autres cas étudiés par lui précédemment) c’est tout le problème de l’erreur méthodologique de M. Charlier.
    Sans une étude historique préalable et sérieuse, les conclusions qu’il tire de ces examens médico-légaux (même s’ils sont conduits correctement), n’ont aucun degré de pertinence.
    Ici, s’il s’avère que ce masque mortuaire est un faux, réalisé par Mme Tussaud à partir de gravures et de portraits (comme le laisse supposer l’enquête historique), toutes les hypothèses de M. Charlier quant à une éventuelle sarcoïdose, n’ont plus aucun sens.
    Quand comprendra-t-il qu’il faut d’abord établir l’identité de l’objet étudié grâce à une étude scientifique de la documentation historique, avant de tirer des plans sur la comète ?
    Cordialement,
    Philippe DELORME
    http://adnbourbon.wix.com/adnbourbon

    Répondre
  • @ Hervé Maisonneuve : oui effectivement l’abus des conférences de presse est étonnant ! ( quelle est d’ailleurs l’étendue du phénomène ?). Mais ou commence l’abus ? Une publication ne devrait-elle pas se suffire à elle-même ? A contrario, la parole ainsi mise en scène n’est-elle pas aussi parfois le seul recours pour briser un consensus institutionnel, jugé à tort ou à raison comme infondé ? Y a-t-il des exemples ou une vérité scientifique n’a pu advenir à la reconnaissance qu’avec le secours d’une conférence de presse ?

    Répondre
  • Si je comprends bien, il s’agit d’une « récidive »…
    Quand je regarde les années de décès des deux derniers « cas litigieux » (1610 et 1794), une seule question me vient à l’esprit :
    À quand une reconstitution faciale avec le crâne de Claude François (ou celui de Jacques Brel) ?!

    Répondre

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