La loi pour une République numérique a été publiée au Journal Officiel la semaine dernière (8 octobre 2016). Sur le site du gouvernement, c'est un cocorico :
- libérer l'innovation en faisant circuler les informations et les savoirs, pour armer la France face aux enjeux globaux de l'économie de la donnée ;
- créer un cadre de confiance clair, garant des droits des utilisateurs et protecteur des données personnelles ;
- construire une République numérique ouverte et inclusive, pour que les opportunités liées à la transition numérique profitent au plus grand nombre.
J'ai parcouru les 43 pages, tout en sachant que la moitié du texte sera mise en oeuvre, comme pour la plupart des lois. Des décrets ne viendront jamais. En ce qui concerne l'économie du savoir, voici l'article 30 :
« Art. L. 533-4. – I. – Lorsqu’un écrit scientifique issu d’une activité de recherche financée au moins pour moitié par des dotations de l’Etat, des collectivités territoriales ou des établissements publics, par des subventions d’agences de financement nationales ou par des fonds de l’Union européenne est publié dans un périodique paraissant au moins une fois par an, son auteur dispose, même après avoir accordé des droits exclusifs à un éditeur, du droit de mettre à disposition gratuitement dans un format ouvert, par voie numérique, sous réserve de l’accord des éventuels coauteurs, la version finale de son manuscrit acceptée pour publication, dès lors que l’éditeur met lui- même celle-ci gratuitement à disposition par voie numérique ou, à défaut, à l’expiration d’un délai courant à compter de la date de la première publication. Ce délai est au maximum de six mois pour une publication dans le domaine des sciences, de la technique et de la médecine et de douze mois dans celui des sciences humaines et sociales.
La version mise à disposition en application du premier alinéa ne peut faire l’objet d’une exploitation dans le cadre d’une activité d’édition à caractère commercial.
II. – Dès lors que les données issues d’une activité de recherche financée au moins pour moitié par des dotations de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des subventions d’agences de financement nationales ou par des fonds de l’Union européenne ne sont pas protégées par un droit spécifique ou une réglementation particulière et qu’elles ont été rendues publiques par le chercheur, l’établissement ou l’organisme de recherche, leur réutilisation est libre.
III. – L’éditeur d’un écrit scientifique mentionné au I ne peut limiter la réutilisation des données de la recherche rendues publiques dans le cadre de sa publication.
IV. – Les dispositions du présent article sont d’ordre public et toute clause contraire à celles-ci est réputée non écrite.»
La France rejoint la plupart des pays en demandant à ses chercheurs de publier en accès libres les recherches sur fonds public. Pour les revues, l'embargo est de 6 mois… mais 12 mois pour les Sciences humaines et sociales ! On se demande pourquoi les publications en Sciences sociales ne sont pas considérées comme les autres sciences… peut-être parce que ce domaine plagie beaucoup ?
PS ajouté le 31/10 : je propose de compléter par une excellente analyse sur le blog S.I.Lex.... bravo
Un commentaire
Des universitaires connus (et assez âgés) des sciences humaines et sociales, et y ayant des responsabilités éditoriales ont publié des tribunes contre cette loi. Il est probable qu’en parallèle les maisons d’édition ont fait pression sur le Gouvernement.
À noter qu’on a également exclu du champ de la loi les compte-rendus de colloques, au motif que ceux-ci sont particulièrement importants en sciences humaines et sociales (?).