C'est un communiqué de presse du 28 juin 2019 qui nous a informé de la vente de EDP Sciences à la société CSPM (Chinese Science Publishing and Media). Est-ce que d'autres revues de sociétés savantes françaises vont être vendues à des sociétés chinoises ?
EDP Sciences est une bonne maison d'édition française, appartenant à la SFP (77,7 % ; Société Française de Physique), à la SCF (19,4 % ; Société Chimique de France), à la SFO (2,5 % ; Société Française d'Optique), et à la SMAI (0,4 % ; Société de Mathématiques Appliquées et Industrielles). Parmi les fondateurs en 1920, il y avait Marie Curie, Louis de Broglie, Antoine Béclère, Paul Langevin, Louis Lumière, Jean Perrin. EDP Sciences a des bureaux au Sud de Paris : Les Ulis.
CSPM est une société d’édition chinoise bien connue dans le milieu scientifique sous le nom de marque « Science Press », dépend de l'Académie des Sciences Chinoise : c'est la "Chinese Academy of Sciences Holdings Co., Ltd" qui en a le contrôle avec une participation (directe et indirecte) d'environ 74 %.
EDP Sciences a un portefeuille d'environ 75 revues, dont certaines en Open Access, en anglais seulement, avec des bonnes notoriétés dans leurs domaines. EDP Sciences a signé DORA, et 4open a été indexé dans le DOAJ : BRAVO.
EDP Sciences publie Médecine/Sciences et Pédagogie Médicale, et vient d'annoncer la création d'autres revues : "We are pleased to announce the publication of two new journals from June 2019 - Integrative Oncology & Rehabilitation and Integrative Respiratory Medicine. The journals are owned by the International Alliance for Integrative Oncology and Rehabilitation Research based in Nanjing, China. Both journals aim to promote scientific exchanges between China and other parts of the world."
Un commentaire
Fin Juin 2019 la nouvelle est tombée sans créer dans la communauté scientifique le « tsunami » quelle aurait dû susciter. Il s’agissait pourtant de l’annonce d’une prise de contrôle totale prévue pour l’Automne 2019 par Chinese Science Publishing and Media (CSMP), filiale de l’Académie des Sciences chinoise, de l’éditeur scientifique français EDP Sciences, nom actuel de la Société du Journal de Physique et Le Radium crée en 1920 par la Société Française de Physique qui s’est désormais étendue hors de la physique à de multiples domaines scientifiques.
Sans vouloir mettre en question la qualité de la communauté scientifique chinoise qui a effectué au cours des deux dernières décennies de remarquables progrès au point d’égaliser les États Unis en nombre de publications annuelles, il est important de souligner que l’Académie des Sciences chinoise dans un communiqué de presse publié le 1 Juillet 2019 ne cache pas son objectif. Avec la reprise d’EDP Sciences elle souhaite étendre son influence à l’étranger, en particulier en France et en Europe.
Il est un fait que l’édition scientifique aux prises avec le mouvement vers l’accès libre et gratuit aux résultats de la recherche est depuis quelques années en pleine tourmente. Elle est dominée par quatre éditeurs commerciaux qui contrôlent plus de 50% des publications et n’entendent pas perdre les positions acquises. Dans ce contexte, la survie des maisons d’éditions de taille plus modeste comme EDP Sciences est délicate. D’ailleurs, nombre de telles entreprises ont déjà été absorbées par l’une des majors de l’édition.
Il est cependant consternant de voir que la France risque de perdre le contrôle de sa seule entreprise de diffusion de la science de taille raisonnable qui de surcroit possède une très bonne réputation auprès des scientifiques français comme dans le monde entier.
Que la poursuite de l’activité de l’entreprise avec l’aide de tout son personnel qualifié soit la priorité, personne ne peut le nier, mais n’y aurait-il pas des solutions autres que le rachat par une société savante asiatique qui ne cache pas ses intentions.
Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche avait fait connaître très clairement il y a un an son engagement en faveur de la science ouverte par le discours de la Ministre Frédérique Vidal qui soulignait, le risque pour la France de rater le virage en cours au plan mondial vers la science ouverte.
Compte tenu de l’implication d’EDP Sciences dans toutes les branches d’activité des organismes de recherche français, n’y aurait il pas là une opportunité pour le MESRI en entrant au capital de l’entreprise. Cette opération pourrait permettre d’une part de la sauver et d’autre part de se doter d’un outil efficace pour la mise en œuvre des préconisations du Comité pour la Science ouverte (CoSo), évitant ainsi le naufrage du vaisseau EDP Sciences en mer de Chine ? Il y a donc une aubaine à laquelle nous devrions réfléchir rapidement.