Il s’agit de pratiques bien identifiées, mais pas assez connues de nos collègues. Ce billet du 17 mai 2022 de RetractionWatch. commence bien : « Les universitaires sincères s’efforcent d’élargir les connaissances et la compréhension des recherches. Ils citent toutes les recherches pertinentes, même celles produites par ceux avec qui ils sont en désaccord ou qu’ils n’aiment pas personnellement. Ils encouragent le débat. Pour le chercheur sincère, une citation est une responsabilité, et des citations correctes et complètes démontrent la qualité de la recherche. »
Et ensuite, il explique : »Pour le chercheur stratège, une citation est un atout à utiliser de manière avantageuse pour sa carrière……. Les chercheurs stratèges citent les travaux de leurs amis, de leurs collègues de travail, de ceux avec lesquels ils sont d’accord et de ceux qui les citent. En effet, les chercheurs les plus performants en matière de stratégie de carrière opèrent au sein de groupes de collègues partageant les mêmes idées, au sein desquels ils promeuvent ensemble les carrières des autres – ce sont des cartels de la citation. Ils attirent l’attention sur les autres travaux qui soutiennent les leurs et leurs carrières…. Les chercheurs qui ont une stratégie de carrière ne citent pas les travaux de ceux qui ne font pas partie de leur groupe, à moins qu’ils ne soient obligés de le faire parce que ces autres travaux sont si bien connus qu’ils seraient largement remarqués. Les débats sont généralement évités avec ceux qui ne font pas partie de leur cartel. »
Le billet de ce blog imagine le cas de 10 chercheurs sincères et 10 chercheurs stratèges travaillant dans le même domaine. Les chercheurs sincères citent tous les travaux, et les stratèges ne citent que les travaux des amis. Vous imaginez 10 articles par an avec 10 citations et vous obtenez la figure ci-jointe en nombre de citations obtenues en 30 ans.
L’exemple est très théorique mais quand même avec un fond de vérité. Vous prendrez plaisir à lire ce billet qui se termine ainsi : Lorsque le public, les décideurs politiques ou les journalistes obtiennent des conseils de la part d’universitaires sincères, ils reçoivent une évaluation approfondie et honnête du sujet. Lorsqu’ils obtiennent des conseils de la part de chercheurs stratèges, ils ne reçoivent que le sous-ensemble de la recherche pertinente sur les politiques qui profite à la carrière de ces chercheurs. Lorsque le gouvernement ou les fondations financent des chercheurs sincères, ils reçoivent, là encore, une évaluation approfondie et honnête du sujet. Lorsqu’ils financent des chercheurs stratégiques, ils ne reçoivent qu’un sous-ensemble biaisé.
2 commentaires
Le biais de copinage est entretenu par le désastreux lien entre carrière et citations.
Plus sournois est le biais de confirmation, trait cognitif plus ordinaire qui conduit à ne considérer que ce qui vient à l’appui de nos préjugés : il pervertit la science depuis toujours et la politique de citations plus que jamais.
Faudrait-il sanctionner les auteurs qui passent délibérément sous silence les publications qui contredisent les leurs ?
Merci pour votre commentaire, et il faudrait des réactions de la communauté, mais lesquelles ? Une prise de conscience serait déjà un progrès. Il n’y a pas assez de recherches sur les conséquences délétères de ces manipulations. Une bonne mise au point a été faite https://www.redactionmedicale.fr/2021/12/le-mesusage-des-citations-genere-des-dogmes-non-fondes-et-nuit-au-progres-des-connaissances
Sanctionner, OUI, mais comment ??? Des investigations mèneront à des débats, voire des conflits avec les auteurs. Il faudrait déjà informer, alerter la communauté scientifique… mais nos dirigeants occupés ne se préoccupent pas de ce sujet, et ce n’est pas un ‘petit sujet’.