Le rapport d’évaluation du centre national de la recherche scientifique (Cnrs) a été mis en ligne le 20 novembre par le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres). Il est intéressant, et notons qu’une version anglaise existe. Le rapport a demandé beaucoup de travail, la participation d’experts internationaux, et il y a une réponse du PDG. Les 12 recommandations sont détaillées, et les annexes très informatives. Des analyses par TheMetaNews, Le Monde et autres médias sont intéressantes.
Je ne commente pas, et je préfère copier/coller des paragraphes sur l’intégrité. J’ai utilisé le gras pour quelques phrases.
Recommandation 5, il y a un paragraphe d/ Méconduite professionnelle (page 23).
Le voici :
Le comité a entendu plusieurs préoccupations concernant le management des situations de méconduite professionnelle et d’autres difficultés dans la vie quotidienne des UMR. Il semble qu’il s’agisse d’un domaine auquel le CNRS doit accorder une attention accrue. Le comité fait les commentaires et suggestions suivants.
- Il n’est pas certain que les procédures du CNRS pour traiter les cas de brimades et de harcèlement sur le lieu de travail soient connues de l’ensemble de la communauté du CNRS.
- Un exemple concret de mauvaise gestion d’inconduite qui a été rapporté au comité a été la suggestion que la victime pourrait changer de laboratoire, ce qui est facilité par le CNRS. Le comité ne peut qu’espérer que ce genre d’attitude ne soit pas monnaie courante. Il souligne qu’il est inacceptable d’attendre de la victime qu’elle subisse les conséquences d’une inconduite. Dans les cas de mauvais traitements, ce n’est pas la victime qui devrait subir des bouleversements importants dans sa carrière, mais l’auteur des mauvais traitements. Le comité ‒ tout en étant conscient que le cas qui lui a été rapporté est peut-être très singulier ‒ a été troublé par l’idée que ce n’est pas toujours le cas.
- Un programme de formation solide pour créer un environnement inclusif et développer les compétences en matière de management contribuerait à l’épanouissement de chacune et chacun au sein des unités de recherche et à la prévention des difficultés.
Recommandation 11 : Encourager une culture de la durabilité, de l’intégrité scientifique et de la recherche responsable
Le comité d’évaluation a constaté avec satisfaction que le CNRS a renforcé son organisation et ses actions en matière d’intégrité scientifique. Cependant, le comité souhaite souligner que l’intégrité scientifique est un sujet qui mérite la plus grande attention de la part du CNRS, et qui nécessite des réflexions plus approfondies pour définir les réponses les plus appropriées que le CNRS pourrait donner lorsqu’il est confronté à des situations délicates.
- La question de la transparence du traitement des fautes éventuelles est une question difficile. Au CNRS, seul un très petit nombre de rapports sur les cas d’inconduite sont rendus publics. De plus, les experts consultés sont anonymes, afin de les protéger de répercussions potentiellement fâcheuses. Bien que cela soit compréhensible, le manque de transparence peut être problématique, en particulier pour les victimes d’inconduite ; c’est aussi une occasion manquée de diffuser dans l’ensemble de l’organisation une culture de tolérance zéro à l’égard des inconduites.
- Une autre question qui mérite d’être examinée attentivement est celle de la définition d’une « échelle de sanctions » appropriée à la variété des cas de mauvaise conduite qui peuvent se produire au sein du CNRS.
- Plus largement, le CNRS devrait examiner s’il considère que son attention à l’intégrité scientifique est limitée au champ de la référence dite FFP (fabrication, falsification, plagiat), ou si elle est étendue à l’ensemble des missions du CNRS. L’intégrité scientifique dans les relations avec les entreprises privées, l’intégrité scientifique dans le dialogue avec la société, ou dans l’apport d’expertise scientifique aux décideurs politiques sont également des questions qui méritent une attention particulière.
Recommandation 12 : Améliorer le partage des connaissances et la communication au bénéfice de la société
La devise du CNRS, « la recherche fondamentale au service de la société », appelle à une contribution plus significative au développement d’une société apprenante, par la diffusion des connaissances. Ces contributions doivent être encouragées, faire l’objet d’un suivi et être reconnues de manière appropriée.
Sous-recommandations
12.1 Établir une politique de transfert des connaissances au bénéfice de la société, y compris en reconnaissant cette responsabilité au plus haut niveau et en fournissant les moyens, les formations et les outils nécessaires à tous les Instituts et aux UMR.
12.2 Inclure dans l’évaluation des chercheurs une évaluation de la manière dont leur travail bénéficie à la société.
12.3 Renforcer la présence du CNRS dans les médias non spécialisés afin d’expliquer sa contribution à la société et son impact global.
12.4 Dans l’esprit d’un dialogue soutenu avec la société, renforcer les canaux de communication et les interactions avec le grand public et la société civile.
12.5 Créer un cadre général pour évaluer l’impact global du CNRS dans tous les aspects de ses contributions à la société.
PS : extrait du résumé du rapport sur la présentation du Cnrs
Le CNRS couvre tous les domaines de la science. Il est organisé en dix Instituts scientifiques. Il dispose d’un budget total de 3,7 milliards d’euros en 2021, dont 2,8 milliards d’euros (76 %) de subvention pour charges de service public allouée par l’État français, et 0,9 milliard d’euros (24 %) de recettes propres. Le personnel représente 31 876 ETP (équivalent temps plein), dont 23 873 ETP d’agents permanents et 8 003 d’agents non permanents.
La recherche au CNRS est organisée en plus de 1 000 unités de recherche (ou laboratoires), qui sont presque toujours partagées avec d’autres institutions, principalement des universités ainsi que d’autres organismes de recherche nationaux et des grandes écoles. Elles sont appelées « unités mixtes de recherche » ou « UMR ». Les UMR du CNRS comptent 109 800 personnes, soit plus de 40 % de l’effectif total de l’écosystème de la recherche publique française ; 27 % de ces personnes sont des salariés du CNRS. Les UMR du CNRS sont réparties dans plus de 80 villes en France.
Un commentaire
En matière de lutte en faveur de l’intégrité scientifique, le rapport du comité est aussi mou que le CNRS lui-même, ce qui n’est pas peu dire… Surtout, ne froisser personne ! La façon dont a été traitée l’affaire Spadavecchia a scandalisé la communauté scientifique internationale, mais chut ! Je ne vois rien, je n’entends rien, je ne dis rien, et le vieux monde continue à tourner sur sa lancée… Jusqu’à quand ? Les forces de frottement ne sont nulles que dans le vide absolu…