J’ai participé du 20 au 22 juin 2024 au colloque de l’IRAFPA (Institut de Recherche et d’Action sur la Fraude et le Plagiat Académique) à l’Université de Coimbra. Les échanges entre participants et l’ambiance ont permis des discussions fructueuses. Près de 50 participants de plusieurs pays francophones, dont le Québec, ayant des pratiques professionnelles très diverses ont discuté de l’intégrité académique, ou plutôt du manque flagrant d’intégrité dans les universités et grandes écoles. Le programme était chargé et les actes du colloques vont être mis en ligne. Difficile de faire une synthèse, donc je rapporte quelques impressions.
L’Intelligence artificielle : l’éléphant dans la formation des étudiants, la pratique des chercheurs et les comportements des étudiants.
Une belle présentation d’introduction de Morgan Blangeois, Université de Clermont-Ferrand, ‘Repenser l’intégrité académique à l’ère des outils de l’IA générative : une approche expérimentale’. Il s’agit d’un travail de recherche. Outre un survol des problématiques générales, l’orateur a évoqué le concept du data collapsing à explorer. Il y aurait 700 000 LLM disponibles ! Tout est possible, le meilleur et le pire, et le conseil est d’expérimenter ces outils individuellement, de faire preuve de beaucoup d’esprit critique, de ne pas surestimer ses performances, d’avoir des doubles vérifications, et d’éviter la dépendance. La détection des contenus générés progresse mais n’est qu’à des taux d’environ 40 %.. des données dans des preprints.
La loi du silence
Des discussions nombreuses autour du tabou entre doctorants et encadrants : il faut parler de l’IA et ne pas l’éviter. En bref, la plupart des étudiants testent l’IA mais ne le disent pas aux encadrants… qui ne veulent pas savoir et qui ont parfois des comportements que l’on peut qualifier de résistance au changement…. pour certains, l’IA, c’est le diable. Il a été évoqué par certains (pas dans le colloque) un moratoire sur l’IA ! Les approches prohibitives ne sont pas souhaitables. Le PlagIA, et l’IAgiarisme ont été largement discutés. Les développements et stratégies de Turnitin (logiciels anti-similitudes) à l’ére de l’IA ont été bien présentés.
Il est urgent de reconstruire le socle de la démocratie académique
C’est un nuage au-dessus de nous tous : est-ce que les hauts dirigeants de nos institutions sont réellement engagés dans la promotion de l’intégrité scientifique ? Nous avons eu des témoignages, des discussions qui montrent qu’en dehors de former les jeunes et de leur faire prononcer un serment, les séniors avaient beaucoup de trucs à cacher… et les convenances sociales ne favorisaient pas les sanctions, qui sont presque inexistantes. Ceci rejoint une tribune de mars 2024 dans Le Monde, non discutée pendant ce colloque, mais qui inquiète : « Il est urgent de reconstruire le socle de la démocratie académique » Le renforcement des pouvoirs de présidents d’université est une menace pour la déontologie, alerte dans une tribune au « Monde » Philippe Cinquin, professeur à l’université Grenoble-Alpes, à la suite de l’annulation par le tribunal administratif des résultats des élections aux conseils centraux de l’établissement.
A signaler : Former à l’éthique de l’IA en enseignement supérieur: trousse pédagogique : Frédérick Bruneault et coll ont préparé une trousse pédagogique qu’ils nous ont présentée. Utile.