Très bien documenté, très actuel, ce petit livre permet d’avoir une vision de l’évolution de notre système de recherche scientifique. Il se lit facilement, bien que ce ne soit pas une partie de rigolade. C’est une compilation administrative et réglementaire utile faite par un expert du domaine. Paru aux puf le 19 juin 2024 (248 pages), c’est le 5ème ouvrage d’une collection intitulée Droit et Déontologie, dirigée par Joël Moret-Bailly.
Livre bien construit avec une introduction et trois parties. Chaque chapitre se termine par une demi-page ‘A retenir’ bien faite.
Introduction
Une quarantaine de pages pour bien fixer les concepts et comprendre les frontières entre déontologie de la recherche et intégrité scientifique, puis entre éthique de la recherche et intégrité scientifique. Les termes sont trop souvent confondus, mal compris. En très bref, déontologie concerne les métiers, les relations entre professionnels ; éthique c’est réfléchir, la morale, la fin de vie par exemple ; l’intégrité, c’est ne pas mentir, ne pas voler… La partie 4 concerne les manquements à l’intégrité : identification, enjeux, mesure, causes… On croit connaître.
Partie 1 Les Sources
Connaissez vous les différences entre soft law et hard law ? Le droit dur est codifié dans les codes de la recherche, de l’éducation tandis que le droit souple concerne les normes non étatiques qui émanent des communautés scientifiques. Les juges ne sont pas tenus par ce qui provient des règles du droit souple.
Les sources proviennent du droit national, du droit international et européen et surtout des institutions spécialisées (Financeurs de la recherche, universités et organismes de recherche, et institutions chargées de l’intégrité comme Ofis, réseaux de référents, et un truc appelé Collège de déontologie du ministère chargé de l’enseignement et de la recherche). D’autres sources proviennent des Sociétés savantes, Académies, revues, congrès,….
Partie 2 Les règles
Je reprends la synthèse du premier chapitre de cette partie (page 112) sans détailler tous les aspects de cette partie (Activité de recherche ; Activité d’évaluation ; Activité d’expertise) :
« L’activité scientifique bénéficie d’un principe de liberté de la recherche, qui recouvre le droit de déterminer ses objets et méthodes de recherche ainsi que d’en diffuser les résultats. La liberté scientifique s’exerce dans le respect de la déontologie de la recherche et de l’intégrité scientifique.
Les chercheurs qui exercent leur activité comme agents publics doivent respecter les règles déontologiques applicables aux fonctionnaires…..
…. Au titre des valeurs qui sous-tendent l’activité de recherche figurent la fiabilité, l’honnêteté, le respect et la responsabilité. Ces valeurs s’imposent à toutes les personnes qui exercent une activité de recherche, qu’elles soient ou non fonctionnaires. »
Partie 3 Le traitement des manquements
Le traitement des manquements est bien codifié dans notre pays, et il y a quatre chapitres dans cet ouvrage : Prévention ; Révélation ; Instruction ; Sanction. Cette partie est intéressante, mais nous observons une différence entre ces principes, ces procédures et la réalité ?
Je me demande toujours quel est le pourcentage de chercheurs réellement sifflés par la patrouille : nous voyons trop de cas connus impunis, nous voyons des investigations qui protègent les universités, les lanceurs d’alerte sont peu reconnus… Il existe un monde qui se protège… mais qui bien sûr défend l’intégrité scientifique. Combien de présidents d’universités ont une volonté de lutter contre les méconduites ? Depuis 2006, une recommandation du rapport Corvol proposait d’établir un état des lieux des cas de méconduites traités par les universités.. Cela devrait venir ! Tout aurait dû être fait avant 2010.. mais cela va venir. La présentation de Carole Chapin, Ofis, lors du Congrès mondial de l’intégrité de la recherche début juin 2024 à Athènes était informative… Les résultats sont toujours attendus…
La prévention consiste en la formation (regarder des trucs sur YouTube), le serment doctoral prononcé par ceux qui ne sont pas les plus concernés, et la médiation.
Félicitons Olivier Leclerc (avec Nicolas Klauser) qui a publié en mars 2024 dans Research Ethics un article intitulé From research misconduct to disciplinary sanction: an empirical examination of French higher education case law. Ce travail a été présenté oralement au Congrès mondial de l’intégrité de la recherche début juin 2024 à Athènes et les diapos sont sur le site de la WCRI.