Il s’agit d’un avis du 23 juin 2023 (non daté dans le PDF) qui est intéressant, bien construit sur un sujet difficile. Je cite des extraits, tout en vous suggérant de lire tranquillement l’avis complet de 27 pages. Au minimum, lisez le résumé. Il y a beaucoup de bonne suggestions.
Rappelons le constat : le monde change
Extrait du résumé : Face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée. Nombre d’entre eux s’investissent pour soutenir des causes ou prendre position sur des enjeux de société – lutte contre les pandémies, dégradation de l’environnement, essor des technologies de surveillance, etc. – selon des modalités variées, de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog. Par ailleurs, le développement des médias et des réseaux sociaux a sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés.
L’engagement public du chercheur est une liberté individuelle. Il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre, d’un côté, l’engagement public du chercheur et, de l’autre, les normes attribuées ou effectivement applicables à l’activité de recherche.
Quatre recommandations pour les chercheurs
1. Le COMETS estime que l’engagement public relève de la liberté du chercheur, qu’il n’y a pas d’incompatibilité de principe avec les normes applicables à l’activité de recherche.
2. Le COMETS souligne que le chercheur est libre de s’engager ou non. Il considère qu’il est toujours préférable de rechercher une assise collective à l’engagement. Cela n’est toutefois pas une condition nécessaire.
3. Le COMETS souligne que le choix de s’engager doit aller de pair avec la prise de conscience, par le chercheur, qu’il met en jeu sa responsabilité non seulement juridique mais aussi morale, laquelle découle du crédit que lui confère le fait de détenir un savoir spécialisé approfondi. A travers l’engagement public sont potentiellement en jeu non seulement la réputation académique et la carrière du chercheur mais aussi l’image de son institution, celle de la recherche et, plus généralement, la qualité du débat public auquel il entend participer ou qu’il entend susciter. Le chercheur dispose d’une position privilégiée qui confère à sa parole un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser.
4. Le COMETS réaffirme que la responsabilité du chercheur engagé passe par le respect de devoirs. Il lui incombe en l’occurrence de :
– « situer » son engagement, c’est-à-dire préciser au nom de qui et en tant que quoi il parle ou agit, déclarer ses liens d’intérêts et expliciter au mieux les valeurs qui sous-tendent son engagement ;
– respecter les normes de l’intégrité scientifique et les exigences de rigueur de la démarche scientifique. Ces devoirs sont le corollaire de la liberté de la recherche, qui est une liberté professionnelle. Ils constituent par ailleurs la meilleure garantie contre les procès en « militantisme ».
Tout en étant conscient de la difficulté que peut représenter le respect de ces devoirs (notamment au regard du fonctionnement des médias), le COMETS n’en recommande pas moins de tendre systématiquement à leur mise en oeuvre.
Co-construire un guide relatif à l’engagement public
Je reprends une recommandation parmi ces six :
5. Le COMETS estime qu’un guide relatif à l’engagement public devrait être co-construit avec les personnels de recherche. Ce guide devrait (1) affirmer clairement qu’il n’existe pas d’incompatibilité de principe entre le travail de chercheur et le fait de s’engager publiquement, (2) rappeler que l’engagement constitue une liberté mais aussi une responsabilité qui suppose le respect de devoirs par le chercheur, (3) fournir des repères solides (par exemple en clarifiant le sens du devoir de neutralité) et des outils concrets pour s’engager en toute responsabilité.