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Beaucoup de bruit pour rien ? Discordance entre les données disponibles sur l’effet antiviral de l’hydroxychloroquine en mars 2020 et son inclusion dans les essais cliniques COVID-19 et les prescriptions ambulatoires

Points clés

epaulard public healthLe titre de ce billet est la traduction du titre d’un article publié en décembre 2023 dans Public Health, par quatre auteurs grenoblois. C’est simple mais très justement accusateur d’une communauté infantile, car incapable d’évaluer les données de la littérature. La base de la démarche scientifique est simple : avant de commencer des essais cliniques chez l’être humain, de quelles données pré-cliniques et cliniques disposons-nous ? Cette question basique a échappé à de nombreux de nos collègues et d’abord au druide des calanques lors de la pandémie à SARS-CoV-2. La réponse était connue dès le début de la pandémie : les données de la littérature connues en avril 2020 ne permettaient pas de commencer des essais cliniques avec la chloroquine ou l’hydroxychloroquine pour les tester contre la COVID-19. J’ai propagé ce message, et avec d’autres, nous avons eu beaucoup d’ennuis…

La culture de l’esprit critique n’est pas répandue dans la communauté médicale, encore moins chez les journalistes et les citoyens.. C’est très grave.

L’article est bien construit, la stratégie de recherche documentaire est détaillée. Outre MEDLINE, et la recherche de références dans les articles obtenus, les auteurs ont exploré le registre des essais ‘ClinicalTrials’, et recherché les quantités de CQ (chlroquine) et HCQ (hydroxyCQ) dispensées par des pharmacies. Les objectifs étaient clairs : we aimed to juxtapose
– on the one hand, the state of science before April 2020 regarding the benefits of (H)CQ in viral infections (this date was chosen because the first communications advocating for (H)CQ were published in February and March);
– and on the other hand, the number and size of HCQ-featuring clinical trials launched after March 2020.

Données sur autres virus avant avril 2020

Ils ont ensuite téléchargé les articles identifiés avant le 1er avril 2020, et les ont classés. Je traduis quelques paragraphes des résultats, et je vous incite à lire les tableaux très bien faits.
En ce qui concerne les publications scientifiques sur l’effet de la CQ ou de l’HCQ sur les virus autres que les coronavirus (n = 894), nous avons identifié des rapports de cas (n = 49), des essais cliniques (n = 32), des méta-analyses (n = 1), des revues (n = 74), des études in vitro (n = 35), des études précliniques (n = 11) et d’autres types d’articles (n = 691) tels que des éditoriaux, des lettres et des commentaires, lettres et commentaires. Tout est détaillé, et des effets in vitro ont été observés pour de nombreux virus. Les doses utilisées semblent élevées si on les compare aux doses chez l’homme.

Il y a eu 11 études pré-cliniques chez l’animal (rongeurs, primates) avec des virus voisins.. résultats divergents mais plutôt pas très convaincants.

Il y a eu 32 essais cliniques (dont 15 thérapeutiques) publiés sur des virus voisins. Cinq études semblaient montrer un intérêt : ces 5 études sont décrites et ne semblent pas d’une qualité méthodologique acceptable

Données sur les coronarovirus avant avril 2020

Les publications scientifiques concernant l’effet de la CQ ou de l’HCQ sur les infections à coronavirus (n = 67) comprenaient des rapports de cas (n = 2), des revues (n = 13), des études in vitro (n = 12), des études précliniques (n = 2) et d’autres types d’articles (n = 38) tels que des éditoriaux et des lettres ; aucune méta-analyse n’a été identifiée.

Des effets in vitro ont été décrits. Deux études précliniques chez la souris n’étaient pas claires. Pas d’études cliniques avant l’article scandaleux de Gautret et al qui a déclenché une paranoïa chez ceux qui ne l’ont pas lu.

Les essais identifiés après le début de la pandémie

La recherche sur ClinicalTrials.gov a été faite le 24 avril 2022.

Au total, 300 études enregistrées sur ClinicalTrials.gov ont évalué l’effet de la CQ ou de l’HCQ sur l’infection par le SRAS-CoV-2, dont 47 études d’observation et 253 études interventionnelles. Sur ces 253 essais cliniques, 28 % (n = 71) ont été menés à terme, tandis que 33 % (n = 83) ont été suspendus, abandonnés ou interrompus prématurément.

Beaucoup d’informations à lire ensuite ++++ avec environ, 6,5 millions de patients à inclure… Il y a aussi les données factuelles de l’augmentation de consommation de HCQ en France.

Une bonne discussion plutôt polie

Un gros travail, avec des tableaux bien faits et beaucoup de suppléments électroniques. Je rappelle que l’article scandaleux, non rétracté de Gautret et al a été cité environ 6300 fois (décembre 2023). La discussion est intéressante, et je la résume à ma façon : le scandale était clair dès le début, les erreurs auraient dû être évitées, la communauté scientifique n’a pas eu d’esprit critique.

Je remercie Olivier Epaulard, dernier auteur, qui m’a transmis le PDF demandé.

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3 commentaires

  • Bonjour,
    Que savez vous sur l étude du clofoctol abandonnée par Pasteur Lille suite à la lenteur administrative. Très efficace in vitro et d après certains cas traités efficacité également chez les covidés.
    Cette ancienne molécule qui ne rapporterait rien était elle à écarter ?

    Répondre
  • Merci de cette recension. C’est à mon avis moins la démonstration d’une insuffisance d’esprit critique (certes indiscutable) de la communauté médicale que la preuve d’une incompétence dramatique des institutions académiques et réglementaires dans leur contrôle de la pharmacopée et des pratiques thérapeutiques – dont la tragique illustration du benfluorex n’est que la partie visible d’un iceberg de laxisme et d’incurie.
    La complexité de l’évaluation thérapeutique excède malheureusement les capacités d’analyse des cliniciens, qui ont déjà tant à faire. C’est aux organismes publics, qui coûtent si cher à la nation, qu’il incombe d’étudier les thérapeutiques, d’évaluer leur utilité, d’assurer leur sécurité d’emploi, et d’en informer la communauté dans un délai raisonnable, voire urgent ; or ils sont clairement défaillants dans cette tâche essentielle. Les praticiens se retrouvent régulièrement avec des avis et des informations (quand ils sont aisément rendus accessibles, ce qui est rare) qui tombent des années après que les questions soient posées. Cette publication en est un douloureux exemple.

    Répondre

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