Si Cabells recense plus de 16 000 revues prédatrices, si STM estime qu’il existerait 35 000 revues sceintifiques en anglais à comité de lecture (domaine STEM Science technologie engineering et médecine, sans considérer les SHS Sciences humaines et sociales), combien y-a-t-il de revues de piètre qualité ? Je ne sais pas mais plusieurs milliers probablement….
Un exemple de comportement inacceptable : plagiat en traduisant l’article original
Je reprends intégralement l’un des encadrés d’une présentation que j’ai faite début juin à Coimbra, colloque de l’IRAFPA. Les actes seront bientôt en ligne, et les auteurs plagiés ont donné leur accord.
– La revue Enjeux et société a publié le 12 novembre 2020 un article intitulé ‘L’enseignement à distance de l’entrepreneuriat : quelle expertise pédagogique ?’ (https://doi.org/10.7202/1073362ar). Il y avait trois auteurs de l’Université Téluq (Québec, Canada).
– Début 2024, leur attention a été attirée par un article publié en 2021 avec le titre ‘Distance learning for entrepreneurship : The satisfaction of the learners’ dans la revue China-USA Business Review. Cet article en anglais était la traduction de leur article original en français avec de nouveaux auteurs, non connus de l’équipe canadienne. Les auteurs étaient Samir Akachi et Arbia Ayed avec l’affiliation ‘Higher Institute of Technological Studies, Sidi Bouzid, Ksar Hellal, Tunisia’.
– Le travail de ces auteurs peu scrupuleux a été présenté à Paris en anglais le 5 juin 2021 lors de la ‘7 th International Hybrid Conference on Management Studies’. (https://www.eurokd.com/content/topic/19). La présentation orale de Arbia Ayed est accessible sur YouTube https://www.youtube.com/watch?v=fqs6BFE8IZg La conférence hybride était organisée par European Knowledge Development (https://www.eurokd.com/), société basée à Ankara en Turquie avec une adresse secondaire à Vancouver, Canada.
– Samir Akachi a un compte LinkedIn qui le présente comme tunisien et enseignant universitaire à la faculté de sciences économiques et de gestion de l’université de Strasbourg. Sur le site de cette faculté, son nom n’apparaît pas dans la liste des enseignants en mai 2024 (https://ecogestion.unistra.fr/faculte/les-enseignants).
– Arbia Ayed est en Tunisie. Elle utilise la même affiliation que son collègue : ‘Higher Institute of Technological Studies, Sidi Bouzid, Ksar Hellal, Tunisia’.
– En février 2024, les auteurs canadiens de l’article princeps ont contacté l’éditeur David Publishing basé à Wilmington, Delaware, Etats-Unis pour signaler cette fraude de type plagiat et demander que l’article soit retiré. Le bureau du rédacteur a contacté Samir Akachi sur une adresse électronique gmail pour signaler ce plagiat. S Akachi a répondu qu’il n’y avait pas de plagiat. La revue a informé l’auteur de sa décision de retirer l’article sans remboursement des frais de traitement. La revue China-USA a retiré l’article de son site internet (mai 2024) sans aucune mention de la rétractation. Le titre de l’article apparaît sur certains réseaux et il n’est pas possible de télécharger un PDF (https://www.sciencegate.app/app/document/download#10.17265/1537-1514/2021.04.001).
Rien de neuf… rappelons nous le cas de Elias Alsabti qui avait, dans les années 80s, pris 50 à 60 articles de revues peu connues pour les publier en anglais. Certains des articles plagiés étaient en japonais !
Le système peut perdurer tant qu’il y aura des chercheurs contents
Je remercie ITO (Innovations et Thérapeutiques en Oncologie) qui a mis mon éditorial en accès libre (volume 10, numéro 4 de juillet-août 2024). Les cancérologues ont connu Oncotarget avant de la quitter lors de la perte du facteur d’impact, et certains ont migré vers Cancers qui pose problème, et qui vient d’être délisté du DOAJ. Ce sont probablement 100 cancérologues français listés dans le comité de rédaction, pléthorique comme d’habitude. Je reprends un paragraphe de l’éditorial d’ItO :
Pour certains collègues, les revues prédatrices et de complaisance sont un choix délibéré. Poursuivre la quantité plutôt que la qualité, rechercher des publications rapides et à bas coût sont des conduites qui nuisent à la crédibilité de la science en général. Pour les chercheurs et institutions, ce sont des pertes d’argent, une mauvaise réputation et des difficultés pour une carrière de long terme. Pour la communauté scientifique, le corpus des savoirs est parasité par des données non évaluées. Une érosion de la confiance dans la recherche pourrait en être la conséquence. Pour le public, des décisions médicales erronées pourraient être observées, voire des risques pour la santé, avec des décisions publiques basées sur ces articles non évalués.
Un commentaire
Bonjour
Vous avez parfaitement raison de dénoncer tous ces phénomènes scandaleux,qui sont la conséquence du « publish or perish » véhiculé par les prédateurs anglo-saxons et qui amènent les chercheurs à se prostituer pour être publiés.
Même en mathématiques où l’on ne brasse pas d’argent,le quantitatif s’est introduit au détriment du qualitatif;malgré tout les revues prédatrices ne sont pas légion
mais le milieu médical est le pire, et c’est pas la peine de se demander pourquoi…suivez l’argent!
Mais je m’étonne que vous ayez pu encenser une étude faite par « d’honnêtes chercheurs » qui a fait le tour du monde,n’ayant pu trouver qu’une revue prédatrice pour y être publiée