Voici le résumé de ce preprint déposé le 15 juillet 2020 sur une plateforme de ISO (MetaArXiv) :
Pendant la pandémie COVID-19, la ruée vers les jugements scientifiques et politiques sur les mérites de l’hydroxychloroquine a été alimentée par des articles douteux qui ont pu être publiés parce que les auteurs n’étaient pas indépendants des pratiques des revues dans lesquelles elles ont été publiés. Cet exemple nous amène à envisager un nouveau type d’entité d’édition illégitime, les « revues d’autopromotion », qui pourraient être déployées pour servir l’instrumentalisation des mesures basées sur la productivité, avec un effet d’entraînement sur les décisions relatives à la promotion, à la titularisation et au financement de la recherche.
Il s’agit d’un bon manuscrit très courageux. Dans notre société où les chercheurs se regardent et n’osent pas dire ce qu’ils pensent, ce message est bienvenu. Il est d’autant bienvenu qu’il ne s’agit pas d’arguments basés sur des opinions, mais d’une recherche factuelle et bien faite (données sources et codes disponibles). L’équipe de Rennes (C Locher, F Naudet) s’est associée à D Moher (Ottawa) et I Cristea (Italie) pour ce travail. Les données factuelles sont étonnantes, faciles à comprendre et je résumerais de façon claire : certains abusent des revues pour leur auto-promotion, et la recherche de ressources. Des comités de rédaction accélérent l’acceptation des manuscrits de collègues… quand je dis accélérer, c’est parfois un jour pour le peer-review et la décision d’acceptation. Cette complaisance est malsaine… Allez-voir les chiffres dans le preprint. Quelques commentaires factuels et vrais sur NMNI (ou Salon des articles refusés), revue qui ne pratique pas le peer review ouvert…
Cette équipe propose d’appeler revues d’auto-promotion, ce que j’appelle bulletins paroissiaux. Ils ont 3 critères pour qualifier ces revues : 1) une proportion régulière et élevée d’articles publiés par un groupe d’auteurs ; 2) existence de relations entre les rédateurs et ces auteurs ; 3) publication de recherches de piètre qualité… La production de l’IHU pendant la pandémie aurait pu être meilleure, car dans le passé cette équipe a produit de bons articles.
Cette situation existe car il y a des complices : l’état par SIGAPS alloue des ressources à ces mauvais articles… est-ce acceptable ? des jurys prennent en compte ces articles sur des CV ou des projets de recherche.. est-ce acceptable ? Elsevier qui a des responsables intégrité n’a pris aucune mesure… même pour des magouilles évidentes, d’autant plus que le facteur d’impact de ces revues augmente grâce à ces pratiques douteuse.. est-ce acceptable ?
Le système des publications n’a aucune régulation. Sur ce blog, P Rimbaud a souvent émis l’idée d’avoir un label de type AOC pour les revues.. bonne idée, mais quel organisme international pourrait le donner ? Comment ? Le système n’est pas menacé que par les revues prédatrices… car la médiocrité de certaines revues est affligeante… les chercheurs ont des responsabilités ! Début août 2020, sur deux plateformes, medRxiv et bioRxiv, il y a 7230 préprints COVID, ce qui doit représenter au moins 30 % des preprints COVID : est souhaitable de publier toutes ces recherches ? Des organisations qui militent sur l’Open Access, comme European Science Foundation avec le plan S, seraient avisées de s’intéresser autant à la qualité des publications qu’à leur ouverture… je suis pour l’Open Access des articles de qualité…
Quelle revue va publier ce preprint qui ne respecte pas exactement le format IMRaD ? Preprint qui déplaira à certaines revues, dont les revues d’auto-promotion… Je ne sais pas… Quantitative Science Studies ? Mais tenter Nature, revue ‘généraliste’ prestigieuse, serait facile, après avoir ouvert la discussion aux limites du domaine biomédical : est-ce que ces pratiques sont limitées aux chercheurs de ce domaine ? Qu’en est-il des revues des autres sciences ? Un autre champ de réflexions.
Avec le centre de journalologie d’Ottawa, j’espère que ce travail continuera. De nombreuses idées à développer pour réguler le système des publications.
PS : je connais 3 des 4 auteurs.
PS : Publié dans BMJ ebm
Un commentaire
Bonjour(nalologiquement vôtre),
La journalologie existe donc, ou devrait exister…puisqu’il existe désormais un nom pour désigner cette chose objet de tous vos soins et de vos espoirs. Reste à en aviser l’Académie, ultime abri de la déesse aux yeux pers ! Tâche ardue : nos cousins canadiens eux-mêmes n’ayant pas encore -si l’on en croit les versions (en) et (fr) du Ottawa Hospital- pas encore proposé de traduction pour journalology…Une tentation pour l’INPI ?